Au sujet de l’article «Ist die freie Improvisation am Ende?», Dissonance N° 111
Cher Thomas Meyer,
Si l’on considère la «musique improvisée libre» comme un mouvement artistique, on est en droit de se poser la question de savoir s’il vit encore ou non. Sauf que la tâche n’est pas aisée: quels sont les critères permettant de constater la mort d’un mouvement musical? Il suffit d’essayer avec d’autres musiques pour s’apercevoir que la mission est difficile. Quoi qu’il en soit, les arguments avancés dans cet article ne sont pas recevables, comme le montrent clairement les réactions des musiciens. Non, ce mouvement artistique, s’il existe, n’est pas mort.
En soi, le fait d’annoncer à tort la mort d’un mouvement artistique n’est pas grave, même lorsque cette annonce s’appuie sur un diagnostic erroné (le supposé cadavre bouge encore, son cœur bat, il n’est même pas endormi ou dans le coma - mais le médecin l’a examiné de très loin en ne prélevant qu’un tout petit échantillon de son organisme). Le problème, c’est que ce texte est publié, qui plus est dans une revue spécialisée, et qu’il a donc un impact politique. Or, de ce point de vue, il est très néfaste, car il donne aux subventionneurs des arguments (qu’ils attendaient avec impatience?) pour diminuer leur maigre soutien à cette musique.
Pour le reste, je trouve que cet article pose - volontairement ou non - quelques questions intéressantes. Que veut dire «libre» dans ce contexte? L’improvisation est-elle un outil, une fin en soi, une manière d’être, une culture ou tout cela à la fois? Quels sont les tabous et les totems de la musique improvisée? Et bien d’autres encore, qui exigeraient des recherches approfondies.
Je trouve dommage que vous n’ayez pas profité de cet article pour poser des questions de fond et que vous vous soyez contenté de nous faire part de la mort de votre intérêt pour une musique que vous avez manifestement appréciée par le passé, donnant à ceux qui veulent lui couper les vivres des arguments pour l’enterrer définitivement - même si ce n’était pas le but du jeu.
Bertrand Denzler
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